L'important c'est le voyage, pas la destination !

Le mat

" Ce qu'un homme ne sait pas ou ce dont il n'a aucune idée se promène dans la nuit à travers le labyrinthe de l'esprit. "
" Le Faust ", Johann Wolfgang von Goethe, 1847

Mat

Première ou 22e Lame du Tarot ? À la fois au début et à la fin, elle n'a pas de numéro, le Mat, symbolise par excellence l’errance humaine à la recherche d’une quête sans fin. Le mat, fol pèlerin blessé à la cuisse, démarre son parcours parmi les arcanes majeures. Le claudiquant, le boiteux est le symbole de l'initiable, du Profane en marche vers l'Initiation. Cette Lame symbolise les voyages initiatiques et la recherche de l’être en soi. C’est en ce sens que les voyages initiatiques, comme les rites de passage ont un sens de transgression sur l’ordre établi permettant le passage social ou spirituel d’un état mental à un autre.

La lame est caractérisé par la lettre hébraïque Shin. "Shin" est un signe caractéristique par son ambiguité : à la fois mouvement et non mouvement dans la stabilité, le feu protecteur de la chaleur, mais aussi celui de l'embrasement destructeur, un chuchotement et un sifflement, l'intelligence et la folie : il nous montre la voie du ciel, celle de la terre, la rigueur et la miséricorde. En fait "Shin" est une lettre secrète qui tient cachée en elle le chemin du repentir, du retour ("shouw", shin-waw-bet) : elle peut le divulguer à celui qui cherche et qui le mérite.

Mircea Eliade a classé les rites d'initiation anciens en trois catégories [1] : ceux qui marquent l'entrée dans une confrérie, une communauté religieuse ou une société secrète ; ceux qui sont liés à l'acceptation d'une vocation mystique ; ceux enfin qui réalisent le passage d'un état biologique et social à un autre, par exemple de l'état d'enfant à celui d'adolescent, ou d'adulte [2]. L'initiation a pour fonction de détruire la personnalité ancienne (une mort) pour parvenir à une personnalité nouvelle supérieure (une renaissance). Ces initiations comportent toujours un enseignement moral et religieux, souvent interdépendants, où le domaine profane se mêle au domaine sacré. L'initié est paré pour affronter le monde qui l'attend.

Les rites de passage : l’initiation sociale

Lier l'individu au groupe

Comment peut-on cesser d’avoir peur de la mort ? Comment sortir vraiment de l'enfance ? Avec l'obligation de comprendre le monde et de devenir soi-même ? Les peuples anciens, dans leur sagesse, avait concentré en quelques jours des cérémonials initiatiques : des souffrances par

ticulières entraînaient une révélation, un changement de nature et l'adaptation à leur monde. Les groupes ethniques primitifs ou les tribus tant soit peu organisées possèdent leurs cérémonies initiatiques, qui sont souvent extraordinairement complexes et qui jouent dans leur vie sociale et religieuse un rôle important. Par ces initiations, les adolescents se muent en hommes et les fillettes en femmes. Cela montre, comme le dit Jung, que « les usages initiatiques constituent les moyens magiques grâce auxquels l'homme passera du stade animal à l'état humain. Manifestement les initiations primitives sont des mystères de la métamorphose de la plus grande importance. »[3].

Les rites de passage permettent de lier l'individu au groupe, mais aussi de structurer la vie de l'individu en étapes précises qui permettent une perception apaisante de l'individu par rapport à sa temporalité et à sa mortalité. Ce phénomène a donc un enjeu important pour l'individu, pour la relation entre l'individu et le groupe, et pour la cohésion du groupe dans son ensemble. Les cérémonies d'initiation se sont conservées chez tous les peuples. Comme exemple religieux, le christianisme conserve les cérémonies initiatiques du baptême, de la confirmation et de l'Eucharistie, qui, de façon pâlie et dégénérée, rappellent les rituels initiatiques. Nul donc ne peut contester l'énorme importance historique des initiations.

Quand l’absence de repères devient principe d’identité…

De nos jours, les choses sont moins simples. Fabrice Hervieu-Wane [4] a pu observer le paradigme, le monde est devenu compliqué à décoder, les identités possibles sont nombreuses. Le choix est d'autant plus difficile qu'il faut le faire soi-même. À la place d'un temps de calvaire initiatique programmé, c'est une partie importante de la vie qui devient souffrance, dans un long chemin vers la mort à parcourir seul. Car même si les rites traditionnels disparaissent, perdant leur fonction cognitive, on observe chez les jeunes de nos sociétés des comportements que l’on pourrait considérer comme des rites de substitution : initiation à la violence, à la drogue, à la délinquance ou à l’intégrisme religieux. Comme s’il existait une insistance sociale, une rémanence de la fonction psychologique de rituels ayant perdu leur fonction structurale. Sans mode d’emploi dans le brouillard d’un passé trop court et d’un avenir incertain, seul le présent vécu le plus intensément répond aux interminables attentes des 13-25 ans (l’âge de la puberté se situe autour de treize ans en moyenne et l’on est préadolescent de plus en plus tôt). Sans initiation sociale, les individus vibrent toute leur vie d’une énergie adolescente. Ils deviennent prisonnier de ce stade qui aurait du n’être qu’une étape de leur vie et se montrent, de ce fait, souvent sous un jour égocentrique, nombriliste, instable et irresponsable.

Les voyages mystiques

Le tourisme de l’initiation

La crise actuelle des valeurs plonge l'homme dans l'insécurité et dans l'angoisse. Il est mal dans sa peau, surtout en Occident, où l'égocentrisme et l'individualisme sont très marqués. Comme de surcroît il est déçu du scientisme, du technicisme et de l'économisme, il se tourne volontiers vers l'irrationnel. Nous assistons à une sorte de « tourisme ésotérique » : c'est là que s'alimente le new age, synthèse de diverses croyances et ésotérismes à l'usage des occidentaux qui sont mal dans leur peau, qui s'interrogent sur leur avenir et leur raison d'être. Dans ce climat, après l’essor des fitness pour le bien-être du corps, voici que fleurissent les commerces du bien-être de l’esprit… un prêt-à-porter de la spiritualité.

Aujourd’hui, dans les agences de voyages et sur l’internet on propose à tour de bras de nouvelles manières de se ressourcer en dépensant intelligemment le capital accumulé par des heures et des heures de travail et de frustrations. Soigner l’âme avant le corps ! Pourquoi pas un voyage initiatique au Tibet ? ou au Japon ? ou sur les chemins de Compostelle ? ou dans ce qui reste de la mythique Forêt de Brocéliande ? Voilà une nouvelle forme de consumérisme de l’initiation… Faut-il en rire ou pleurer ? C’est peut-être mieux que la simonie des pèlerinages de masse tels que Lourde ou la Mecque ?

C’est pourtant bien la preuve d’un réel besoin de nos contemporain de rechercher, en dehors des religions établies, une certaine forme de spiritualité permettant d’éviter de s’engager en profondeur. Car tel est bien là, le problème. La véritable initiation demande un engagement profond et sincère, ce qui peut faire peur quand on préfère la superficialité… On évite ainsi la mise en question de l'ego et on se conforte dans le nombrilisme. « Le touriste (a écrit le sociologue Olivier Burgelin) est un voyageur à qui l’on a offert de profiter de tous les avantages du voyage sans devoir en subir le moindre inconvénient. Qui aurait refusé une telle proposition ? ».

Chamanisme et tourisme chamanique

Le chamanisme (ou Shamanisme) est notre plus ancien héritage spirituel. On en trouve des traces remontant jusqu'au moins 30’000 ans avant notre ère. On le rencontre, partout dans le Monde, sous des formes presque semblables. Quelques sociétés isolées l'ont gardé intact jusqu'à nos jours. Cette voie « naturelle » ou « animiste » met l'accent sur le fait qu'une autre partie de la « réalité » existe. Cette autre réalité ne peut être accessible à notre esprit que dans certaines conditions particulières. Le principe étant une initiation rituelle par l’absorption de drogues végétales permettant d’effectuer des voyages en dehors du Temps et de l’Espace pour rejoindre l’Âme du monde et ne faire qu’un avec elle. Cette manière de voir n’est pas très éloignée des doctrines alchimiques… La tradition chamanique est en fait, une des première religion de l’Homme. Elle s’est répandue sur tous les continents, avec une variété quasi infinie de rituels, pratiques, techniques et mythologies. Le point commun de tous les chamans ? La transe. Quelle que soit leur origine, ils sont capables de modifier leur état de conscience ordinaire pour entrer dans un autre monde où ils reçoivent l’enseignement des « esprits ». Ainsi accèdent-ils à une sorte de quatrième dimension où tout pouvoir leur est donné pour guérir, interpréter les rêves, voir l’avenir, garantir l’harmonie entre les hommes et la nature.

Mais alors que dans la tradition le chaman est un individu « doué », « choisi par les esprits », seul capable d’entrer en transe, certains chamans modernes considèrent que cette technique est accessible à tous. Ce n’est pas tout à fait faux. Rien de plus facile, en effet, que d’entrer dans une transe légère. Rêverie, lecture absorbante d’un livre, méditation spontanée devant un coucher de soleil sont des exemples de petites modifications de la conscience que nous vivons tous au quotidien. Elles sont aussi les prémices de l’entrée dans une réalité autre. Un état modifié de conscience. Les chamans pratiquants ajoutent quelques ingrédients supplémentaires pour que cet état modifié de conscience soit de plus en plus profond : son monotone d’un tambour, ou ingestion de plante hallucinogène, utilisés dans un cadre spécifique, avec des rituels très précis. Ces conditions sont beaucoup moins rigoureuses chez certains qui pratiquent des ersatz de cérémonies initiatiques pour répondre à la demande de sensations fortes. Le résultat n’est alors guère meilleur que celui obtenu dans les « raves party » (manifestations [5] alliant musique, danse et drogues) par exemple, dont la rythmique assourdissante plonge des milliers de participants dans des états très décalés… et pas vraiment thérapeutiques.

Voyages initiatiques

Le labyrinthe

LabyrintheTous les voyages initiatiques ou les rites de passages sont organisés pour aider l’individu a accepter ses peurs et à les transmuter pour atteindre un état de sagesse, de maturité et de plénitude. Comment s’épanouir et accepter la mort ou la souffrance si on en est esclave ? La conquête de la Liberté passe d’abord par la transgression des tabous pour permettre de comprendre qu’il n’y a pas de liberté sans émergence de la conscience et sans travail sur soi.

Le labyrinthe outil par excellence, permet l'accès à une finalité grâce à un voyage initiatique, et l'interdit à ceux qui n'en ont pas les "qualités" requises. En ce sens, on a rapproché le labyrinthe du mandala, qui comporte d'ailleurs parfois un aspect de labyrinthe. Il s'agit donc d'une figuration d'épreuves initiatiques, préalables au cheminement vers une finalité recherchée. Les labyrinthes gravés sur le sol des églises étaient à la fois la signature de confréries initiatiques, de constructeurs et les substituts du pèlerinage en Terre Sainte. C'est pourquoi on trouve parfois au centre, soit l'architecte lui-même, soit le Temple de Jérusalem : l'élu parvenu au Centre du monde, ou symbole de ce Centre. Le croyant qui ne pouvait accomplir le pèlerinage réel parcourait en imagination le labyrinthe jusqu'à ce qu'il arrive au centre, au lieu saint.

Aux yeux des alchimistes, il serait une image du travail entier de l'œuvre avec ses difficultés majeures. Celle de la voie qu'il convient de suivre pour atteindre le centre, où se livre le combat des deux natures ; celle du chemin que l'artiste doit tenir pour en sortir. Cette interprétation rejoindrait celle d'une certaine doctrine ascético-mystique : se concentrer sur soi-même, à travers les mille chemins des sensations, des émotions et des idées, en supprimant tout obstacle à l'intuition pure, et revenir à la lumière sans se laisser prendre aux détours des chemins. L'aller et le retour dans le labyrinthe seraient le symbole de la mort et de la résurrection spirituelle. Le labyrinthe conduit aussi à l'intérieur de soi-même. C'est là, dans cette crypte, que se retrouve l'unité perdue de l'être, qui s'était dispersé dans la multitude des désirs.

Jung a introduit le mot « uberpersonlich » dans sa description de la psyché humaine. Pour accéder à cela, il faut aller jusqu’au bout de sa folie, mais il faut dépasser ses peurs et voir la réalité au delà de cette folie. Communier avec le chaos primordial, voir la réalité sans masques, en décoder le fonctionnement. Expérimenter la mort totale de l’ego. Comprendre que autant nos bonheurs que nos malheurs sont finalement ni les autres, ni nous-même, mais juste des forces universelles qui sont derrière chaque chose, en chacun de nous, et que chacun à notre manière nous nous les approprions, nous en faisons quelque chose de personnel. Derrière chaque instant de bonheur, il y a l’envie de s’approcher de cette réalité sans masque, l’amour universel. De la même façon, derrière chaque malheur, il y a la peur de cette même réalité sans masque, la peur universelle. Ces deux forces sont au delà même de la pulsion de vie de la pulsion de mort. La vie est lié à l’ego, et l’expérience de mort de l’ego est au delà de la vie et de la mort. C’est de l’individualisation qui est faite du flux et du reflux, (SOLVE et COAGULA). c’est de ces deux énergies que naissent chaque chose. Nous rejoignons ici l’Alchimie et la Table d’émeraude. « Ce qui est en bas, est comme ce qui est en haut : et ce qui est en haut, est comme ce qui est en bas, pour faire les miracles d'une seule chose ».

SOLVE et COAGULA

Chaque augmentation de salaire, dans le système maçonnique est caractérisée par des voyages initiatiques. Le rituel ne s'adresse pas au conscient, mais à l'inconscient. Il s’agit essentiellement de pratiques de circumanbulation particulières à caractère éminemment symbolique et propre à un degré d’évolution du récipiendaire. Pratiquer le symbolisme, c'est vivifier le questionnement sur la réalité et le langage. Cette approche de l'Art Royal libère des tics mentaux et des conditionnements « profanes ». L'Art Royal est l'art de faire des rois, c'est-à-dire des hommes libres, lesquels agissent au lieu de réagir, produisant du sens au lieu d'en reproduire.

Les voyages initiatiques de la franc-maçonnerie ont empruntés leurs sources à différents courants des traditions anciennes, de l’Égypte antique à l’Hébraïsme en passant par l’Hermétisme, le Zoroastrisme, le Mithraïsme et le Christianisme. Ces voyages sont toujours basés sur une allégorie, En franc-maçonnerie, il s’agira de la légende du grade qui est un psychodrame à forte charge symbolique et émotionnelle ayant pour objectif de provoquer le questionnement et la recherche du sens. Le but étant toujours de franchir un pallier dans la connaissance de soi et d’aller toujours plus loin dans la maîtrise de l’ego afin que le vieil homme meure et que l’initié naisse et s’épanouisse sur le chemin initiatique de la Lumière.

Fidèles aux principes de l’Alchimie, les rituels maçonniques sont basés sur les notions de SOLVE et de COAGULA. SOLVE signifiant la nécessité de dissoudre la matière première (la Pierre Brute), et COAGULA étant la fixation de cette matière une fois enrichie (la Pierre cubique). Là, se situe la recherche de la pierre occulte dont nous parle l’abréviation latine V.I.T.R.I.O.L. ... C’est le produit des deux agents alchimiques : le Soufre (Âme, spiritus anima) et le Mercure (l’Énergie vitale de l’Univers, source de la Vie) qui agissent sur le corps physique (l’Arsenic). Par exemple au premier degré, les 3 voyages qui sont en fait 4 si on y additionne le passage dans la Terre, le Cabinet de Réflexion, sont associés aux 4 éléments alchimiques purificateurs : la Terre, l’Air, l’Eau et le Feu. qui vont dissoudre la personnalité du récipiendaire, c’est l’œuvre au noir, SOLVE, pour que celle-ci puisse avec le fil à plomb entrer en introspection et aboutir à une reconstruction par le niveau, COAGULA (Pierre cubique à pointe), au grade de Compagnon ; C’est l’œuvre au blanc. Au troisième grade suivra l’œuvre au rouge avec à nouveau un SOLVE et un COAGULA entre le compas et l’équerre…

La franc-maçonnerie procure les métaphores propres à éclairer les voies obscures qui relient les désirs aux idées, les émotions aux représentations du monde. Bien souvent, le discours sur les symboles et les mythes s'enlise, chez certains, dans l'occultisme ou le dogmatisme, créant ainsi des malentendus. Les "occultistes" apaisent leur "mal-être" en se réfugiant dans une exploration fantasmée de la face cachée des choses. Leur plaisir est le sentiment d'appartenir aux groupes des "Élus" auxquels serait réservée la contemplation des vérités sublimes. Les "dogmatistes", par contre, ne se contentent que de reproduire du sens et le figer afin de se rassurer eux-mêmes et d’être certain de détenir une certitude conforme aux doctrines dites "officielles". Les "positivistes", enfin, croient que le symbolisme se réduit à ce qu'en font les "occultistes" ou les "dogmatiques" et le rejettent en bloc. Ainsi ils négligent la voie intérieure, l'introspection, et demeurent prisonniers des préjugés de leur époque et des idées reçues.

Conclusion

Dans sa quête de sens, l’Homme a toujours essayé de chercher une Voie spirituelle, lui permettant d’aller au-delà du réel et de la mort. La peur de la mort est effectivement la première et la plus ancienne des peurs que l’Homme doit vaincre. À l’inverse des animaux, l’homo sapiens est un être qui anticipe la mort aussi bien chez les proches qu’il chéri qu’envers lui-même. Dès l’enfance la peur de la mort est une réalité qu’il faut affronter ou biaiser… La peur de mourir est un sentiment typiquement humain. La vie s'organise autour de cet axe : la fin. On sait que toute chose prendra un jour fin sous la forme actuelle qu'on connaît. Cette peur peut devenir une angoisse démesurée si elle n’est vaincue par un travail sur soi.

L'entrée en Franc-maçonnerie, l'insertion dans la chaîne d'union fraternelle, prend la forme de trois voyages symboliques et initiatiques. Bousculé, handicapé par sa tenue (il a dû se déchausser), désorienté, aveuglé (il porte un bandeau), le candidat à l'initiation éprouve les difficultés de la circulation profane, assourdissante, heurtée, faite d'affrontements, d'obstacles, d'entraves. C’est bien là, la symbolique de la Dualité primaire et du Labyrinthe initiatique !

Progressivement, il se laisse guider par les frères qui l'initient au silence, à une circulation apaisée et harmonieuse dans le sanctuaire. Au cours de son apprentissage, le franc-maçon intègre les règles de déplacement dans l'enceinte du temple et de circulation de la parole sur les colonnes où prennent place les membres de la Loge. En fin de tenue, les frères éprouvent symboliquement la résistance de la « chaîne d'union », chaîne fraternelle qui unit les « francs-maçons dispersés à travers les deux hémisphères ».

Les voyages initiatiques transforment l’impétrant en Franc-Maçon, la pierre brute en Pierre taillée, le chemin profane en Voie Royale. Les voyages initiatiques permettent d’accéder à des dimensions nouvelles an moyen d’un langage symbolique qui vise à transformer notre être intérieur par des ondes de choc émotionnelles. Nos références profanes vont être ébranlées, transformées en profondeur pour nous faire toucher de nouvelles valeurs, de nouveaux modes de faire et surtout un nouveau mode d’être. Le voyage initiatique va nous révéler un nouveau monde par son discours symbolique et va nous ouvrir à une nouvelle sensibilité qui nous poussera à jeter un regard neuf sur le monde extérieur ; mais plus important encore, il nous suggère l’ouverture à un monde oublié dans la vie profane : notre monde intérieur. À l’image du mat, cela nous est clairement signifié dans le cabinet de réflexion déjà par le sigle « V.I.T.R.I.O.L. », (visita interiora terrae rectificandoque occultum lapidem).

Goethe a pu dire dans l’un de ses poèmes :

« Mais tant que tu ne comprendras pas
La loi de mort et de renaissance,
Comme un triste étranger, dans ce monde,
Tu suivras un sentier obscur. »


[1] Arnold Van Gennep, dès le début du siècle, avait noté l'importance des « rites de passage » dans nos sociétés : naissance, puberté sociale, mariage, accouchement, funérailles. Voir Les Rites de passage, rééd. Picard, 1981.

[2] Ainsi les rites de puberté comme la circoncision ou l'excision, dont la force de survivance dans nos sociétés occidentales vient de ce que socialement un groupe humain tient pour inachevé celui ou celle qui n'est pas passé par ces rites.

[3] C. G. Jung, Dialectique du Moi et de l'Inconscient, éd. Gallimard, Folio, 1964, 242.

[4] Les nouveaux rites de passage : L’ivresse ici et maintenant, Par Fabrice Hervieu-Wane.

[5] Une rave ou rave party est une fête techno se tenant généralement dans un lieu inhabituel, tel une forêt, une grotte, des bâtiments divers et variés, désaffectés ou non. Le terme rave party désigne aussi assez souvent une soirée house, trance, trance goa, trance psychédélique. L'esthétique du lieu, la décoration et l'environnement visuel sont généralement extrêmement soignés dans ce type de soirée.